Extrait

« Alors je tiens sur quatre pattes, je sais maintenant tuer. Un soir, la chatte me tire dessous le verre cassé. Mon dos se griffe, de cette blessure d’épaule, qui se rouvrira chaque fois que je passerai le soupirail. Une croûte vive. Mais je sors du placard, je gagne la forêt.
La nuit se lève. Ça met le bleu du ciel dans les troncs, les feuillages. Avec ce clair de nuit qui fait de l’ombre à l’ombre, allume dans les toiles les yeux des araignées.
Le jour est pour les bêtes à sève. La nuit est pour les bêtes à  sang. Quand nos proies gonflées de graines, de fleurs, de fruits sont mussées à  dormir, dans les fentes, dans les nids. Quand la terre fait comme la chair d’une viande vive, roulée dans les brindilles. Où nous plongeons la patte, où nous fourrons le nez. Quand chaque empreinte dresse une odeur, où la fourrure s’entortille. Puis soudain disparaît.
La chatte est là , immobile. Elle me sent qui voudrais bondir. Courir retourner comme des pierres tous les sentiers de la forêt. Mais elle ne bouge pas. Alors je m’empêche. Je retiens ce qui frétille. Je fais comme elle, la patte dans sa trace, le nez à  son vent.
Nos moustaches s’éparpillent pour palper le vide, chercher les fentes où ça Respire. Un étirement dans une mousse, un lapin en train de rêver.
Et d’écouter si tant nous couvre de silence, tout se tait au-dedans, nous ne sommes plus que la forêt. »

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